La cure

 

A l'origine, la cure de St Sulpice de Nully dépendait de l’Archidiaconé du Corbonnais dans le Diocèse de Sées

Archidiaconé du Corbonnais – carte de 1718  (1)

 

 

Le jour de la fête était fixé au 17 janvier (date commémorative de la mort de St Sulpice , décédé le 17 janvier 647). La translation des reliques de St Sulpice avait lieu le 1er dimanche de septembre.

1 - Droits des moines de St Denis > En 1031, Geoffroy III, Seigneur de Nogent, entreprit la fondation du monastère de St Denis de Nogent le Rotrou. Assassiné en 1040, c’est son fils ROTROU II, Comte de Mortagne, qui ne le termina que vers 1077 et le dota de très nombreux biens. Vers l'an 1080, Geoffroy IV, 1er comte du Perche, soumit à l’ordre de Cluny tous les biens du Monastère de St Denis donnés par son père et y ajouta, entre autres, l'église de St Sulpice de Nully.(2)

2 – Droits des abbés de Thiron > Au début du XIIème siècle, Rotrou III, 2è Comte du Perche avait fait de nombreux dons à l'Abbaye de Thiron fondée en 1109 (Thiron Gardais - E et L). C'est ainsi qu'apparait dans le cartulaire de ladite Abbaye de Thiron, l'église de St Sulpice de Nully déjà donnée auparavant aux moines de St Denis de Nogent.

Par donation, Rotrou III avait-il réduit celle de son père et partagé ainsi l'église de St Sulpice entre St Denis de Nogent et Thiron ? De nombreux écrits et documents semblent en effet confirmer ce fait. (3)

3 – Transfert des droits des moines de St Denis aux chanoines de Toussaint > En 1203, Mahaut de Bavière (Mathilde de Saxe), veuve de Geoffroy V, 4è Comte du Perche, contribua à la fondation de l'église collégiale de Toussaint à Mortagne. Précédemment, les Religieux de St Denis de Nogent avaient la qualité de présentateurs de tous les bénéfices ecclésiastiques de Mortagne. Une transaction leur accorda le droit d'être nommés chanoines de la Collégiale de Toussaint. C'est sans doute à ce titre et suite à cette transaction que leurs droits dans l'église de St Sulpice qu'ils détenaient depuis  l'an 1080, furent attribués directement aux Chanoines de Toussaint. (4) (5)

Pendant plusieurs siècles et jusqu'en 1789, en ce qui concerne cette cure de St Sulpice de Nully, nous retrouvons dans divers écrits :

- les religieux de l'abbaye de Thyron comme patrons ou présentateurs au bénéfice de ladite cure avec le pouvoir d'y nommer les curés et comme décimateurs  pour moitié ;

- les Chanoines de l'église collégiale de Toussaint, décimateurs pour l’autre moitié.

Il apparait donc quelquefois, qu'ils perçoivent la dime ecclésiastique chacun pour moitié et qu'ils abandonnent la portion congrue au curé ; mais plus souvent, qu'ils partagent la dime avec ledit curé chacun pour un tiers.

 

Biens de la cure

 

Au cours des siècles, la cure était devenue propriétaire de plusieurs terres et rentes sur la paroisse. Ces biens lui avaient été légués par des habitants et quelques prêtres de la paroisse à charge pour les curés en fonction de faire dire des messes régulièrement pour le repos des âmes des donateurs.

 

Une mention en marge sur la page réservée à la paroisse de St Sulpice dans le Pouillé conservé aux archives du diocèse de Sées nous confirme la répartition de la dime de la cure, la superficie de ses biens et les charges qui en découlent. (voir la reproduction ci-dessous). (6)

 

Non datée mais postérieure à 1694, cette mention nous apprend que la cure est propriétaire d’environ 14 arpents de terre et d’un petit bordage.

Ces biens correspondent aux terres désignées dans les titres de propriété de la cure présentés en 1792 par Michel Olivier, curé de St Sulpice, et qui comprenaient : (7)

- le testament de 1587 de François Boussard qui avait légué 5 boisseaux ¼ de terre à la cure à charge de faire la prière tous les dimanches et fêtes solennelles pour le repos de son âme ;

- le testament de 1595 de Michel Boussard qui avait légué  3 bx de terre à charge de faire dire 4 services chaque année ;

- le testament de 1632 de Marie Saugeron qui avait légué 2 bx de terre à charge de dire 2 messes basses chaque année et de faire la prière aux 4 fêtes solennelles ;

- le testament de 1639 de Jeanne Marboeuf qui avait légué 2 bx de terre à la charge de 2 messes basses et un service ;

- le testament de 1671 de Michel Marboeuf, curé de St Sulpice, qui avait légué  le lieu de Grande Fontaine comprenant maison, granges, étables, cours, jardins et terre pour environ 30 bx, à charge de faire dire 1 première messe les dimanches et fêtes solennelles, fêtes de la Vierge et de St Sulpice … En outre, il avait demandé que son corps soit enterré dans le chœur de l’église de St Sulpice. C’est sans doute de cette sépulture dont fait état le procès verbal de visite épiscopale de 1701 relaté dans l’article précédent concernant l’église.

- le testament de 1694 de Christophe Rousseau qui avait constitué une rente annuelle de 30 sols au profit de la cure à charge de 2 messes basses ;

-  le don de 1694 par les héritiers Olivier de 14 bx ½ de terre à charge d’une rente de 4 livres et 20 sols (soit 100 sols) au profit de la cure de St Denis et à charge de faire dire 1 messe  haute le 5 septembre de chaque année à perpétuité pour le repos de l’âme de défunt Denis Olivier, ex curé de St Sulpice ;

- la cession de 1698 par les héritiers Rousseau de ¼ b de terre en pâture et marais pour y faire un vivier, joignant le presbytère contre l’abandon de la rente annuelle de 30 sols ci-avant, à charge desdites 2 messes basses et de laisser les bestiaux des héritiers Rousseau s’abreuver au futur vivier ;

- le testament de 1710 de Mathurin Lainé qui avait légué 2 bx de terre à charge d’inhumer son corps dans l’église et de faire dire 2 messes basses tous les ans à perpétuité ;

- le testament de 1717 de François Bellier, curé de St Sulpice, qui avait légué ses meubles, un lot de terre proche la Grande Fontaine (superficie non indiquée) et une rente de 3 sols à charge de l’inhumer dans le chœur de l’église et de demander à dix confrères prêtres de dire la messe moyennant un diner et trente sols de rétribution à chacun desdits prêtres, de distribuer aux pauvres 6 bx de grain de mouture le jour de l’inhumation, de faire dire 1 messe toutes les semaines et 2 services chaque année ainsi que la prière aux quatre fêtes de l’année pour le repos de son âme, le tout à perpétuité.

 

L’ensemble de ces titres représente environ 60 bx, soit 15 arpents, (probablement grandes mesures du Perche) ce qui correspond à environ 10 ha.

 

En réalité, ces titres ne représentent que les biens de la cure chargés de fondation, c'est-à-dire comme nous pouvons le voir dans les legs, soumis à l’exécution de messes et services religieux. La cure possédait d’autres biens, non soumis à charge ou dont les charges sont inconnues, puisqu’à la révolution, elle détenait de 25 à 30 ha disséminés sur l’ensemble du territoire paroissial. C’est ce que nous révèlent les ventes et adjudications des biens nationaux intervenues de 1791 à 1796.  Ce sont environ 220 boisseaux de terre (mesures nouvelles) soit 55 arpents provenant de la cure et du trésor de fabrique qui furent aliénés comme biens nationaux pendant cette période. (8)

 

La dernière vente fut celle du presbytère le 21 messidor an 4 (9/7/1796) dont voici reproduit textuellement un extrait :

«  Extrait de la vente faite le 21 messidor an 4 au sieur Yves Lefort

1°) la maison presbitérale de la commune de St Sulpice de Neuilly en toutes circonstences et dépendences consistant en une salle, petite laiterie, cave, caveau, trois chambres hautes, un cabinet, grenier. Sur le tout une grange à bled, une à mars, pressoir, écurie, une cour sur laquelle sont construits les batiments contenant environ six perches ; un petit terrein vasgue au bout du pignon de la grange contenant environ deux perches servent de fossé à fumier autour duquelle il y a quelques arbres complanté ; joignant par devent le chemin de St Sulpice à Mortagne et des autres parts les objets ci après désigné.

2°) un jardin contenant environ un bosseau de terre joignant d’un coté Jean Boisselet, la haye en dépendant, d’autre coté le vivier, d’un bout Jean Louis LeMarié, la haye et le vivier en dépendant, d’autre bout Marin Lefort, la haye et le fossé y compris.

3°) un petit verger contenant environ un demi boisseau joignant d’un coté Jean Louis Lemarié, d’autre coté le vivier faisant partie dudit objet et séparant le jardin d’avec le verger, d’un bout LeMarié, la haye en dépendant, d’autre bout le chemin de St Sulpice à Mortagne.

Cette au surplus que la ditte maison, batiment et dépendences se poursuit et comporte avec les haye et fossé qui peuvent en dépendre sans en rien excepter ni réserver.

Lesdits biens sont vendus avec leurs servitudes actives et passives, francs de toutes dette, rente foncière constituée ou hypotéquée, de toutes charges ou redevences quelquonques.

Cette vente est faitte outre les dittes charges et conditions moyennant la somme de deux mille huit cent vingt francs. » (9)

 

C’était, comme dans la plupart des paroisses, la plus imposante habitation du village. L’état de section de 1834 nous apprend qu’elle était constituée de 8 ouvertures imposables (portes et fenêtres ordinaires) pour un classement 1. Il n’y avait qu’une autre habitation classée 1 dans le bourg avec 6 ouvertures. Les 27 autres logements du bourg étaient classés de 4 à 10 avec une moyenne de 3 ouvertures dont 19 avec seulement 2 ouvertures imposables.

Malgré ce classement qui laisse supposer une habitation en bon état, le presbytère disparut à peine un siècle plus tard, sans doute par défaut d’entretien, puisqu’il est annoté comme démoli en 1926 sur la matrice cadastrale. Les derniers propriétaires furent les époux Bazeil, pépiniéristes à Mortagne qui l’avaient achetée en 1900. Monsieur Bazeil décéda l’année suivante et, en 1926, au décès de sa veuve, leurs héritiers étaient propriétaires d’une majeure partie des habitations du bas du bourg, proches de l’église, dont la plupart n’existent plus depuis près de 75 ans (10). De cet ensemble de maisons, subsiste encore aujourd'hui un petit puits en bordure du chemin de la Grande Fontaine qui, selon la rumeur, serait celui de l’ancien presbytère. Or, il n’apparait pas dans le descriptif ci-dessus de 1796 mais il est inclus dans les actes de propriété de la maison voisine. D’ailleurs, sa situation actuelle comparée au plan napoléonien, nous révèle que celui-ci faisait bien partie de cette propriété voisine ayant appartenu également auxdits héritiers Bazeil.

 

 

Sources :

(1) BNF Gallica :carte du Diocèse de Séez – 1718.

(2) Histoire et cartulaire de Saint Denis de Nogent le Rotrou –Vte de Souancé – 1899

(3) Cartulaire de l’abbaye de la Sainte Trinité de Tiron – L Merlet – 1883

(4) L’Eglise Collégiale et Royale de Toussaint à Mortagne – Jean Vigile (cahiers percherons)

(5) A.D. Orne – Fonds J Besnard 1494/25

(6) Pouillé des archives diocésaines

(7) A.D. Orne – cote L 6899

(8) A.D. Orne – série 1Q

(9) A.D. Orne – cote E dépôt 205-8

(10) arch. communales


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